La Masterclass
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Portrait of Kristina Babina

Kristina Babina et sa startup TotUP estiment qu’il est temps que le système éducatif se saisisse à bras le corps de ce qu’apporte le progrès. En tant qu’entrepreneuse et éducatrice de premier plan, Kristina nous éclaire sur son parcours et l’approche unique adoptée par TotUP pour accompagner l’édification des jeunes esprits.

Bonjour Kristina! Qu’est-ce qui vous a amenée à devenir une entrepreneuse?

Bonjour! Je suis née dans une famille d’entrepreneurs, donc dès mon plus jeune âge, j’ai eu clairement conscience que, tôt ou tard, j’aurai ma propre activité professionnelle.

J’étais aussi une enfant hyperactive. Les méthodes d’enseignement qui m’ont été dispensées n’ont jamais correspondu au style d’apprentissage dont j’avais besoin, et cela, du préscolaire à l’université. Ce n’étaient pas les sujets qui étaient difficiles à comprendre pour moi, non, c’est le format des enseignements qui n’était pas engageant. J’avais besoin de quelque chose de plus dynamique et de plus pratique.

Lorsque j’ai eu 19 ou 20 ans, j’ai voulu créer un espace où les enfants pourraient se sentir eux-mêmes. Pendant mon année de maîtrise, j’ai étudié de manière approfondie l’éducation préscolaire, en comparant les systèmes existant dans des pays tels que la Chine, le Japon, les États-Unis, le Canada et le Royaume-Uni. Cela m’a ouvert les yeux sur les lacunes du système d’éducation préscolaire suisse. Ici, le concept d’éducation de la petite enfance n’était pas aussi intégré qu’il aurait dû l’être.

Kristina Babina holding a baby

Je voulais aider les enfants à explorer leurs intérêts propres, plutôt que de les voir se conformer simplement à un modèle d’éducation standard. Chaque enfant est unique et nous devons découvrir tôt son potentiel pour le guider efficacement vers ce qui est son intérêt naturel. Cette vision des choses a donné naissance à TotUp.

Pouvez-vous retracer pour nous l’histoire de la création et du développement de TotUp?

Oui, bien sûr! Forte de mes connaissances acquises en maîtrise, j’ai commencé à travailler avec des professionnels de l’éducation préscolaire et j’ai mis au point les méthodologies qui sont désormais au cœur de TotUP. Nous avons affiné notre approche grâce à des tests menés sur une période de six années. Elle repose sur l’idée qu’il est possible de détecter l’intérêt naturel d’un enfant dès l’âge de cinq ans.

Je voulais aider les enfants à explorer leurs intérêts propres, plutôt que de les voir se conformer simplement à un modèle d’éducation standard.

Kristina Babina

Après cinq ans, les enfants commencent à développer le concept d’amitié et la capacité de s’adapter au monde extérieur. C’est la raison pour laquelle ils vont dès lors entreprendre des activités pour imiter leurs amis. Cela est souvent considéré comme un véritable intérêt. A tort! De nombreux enfants finissent en effet par abandonner l’activité en question parce qu’ils n’y avaient pas un intérêt naturel. Nous devons faire la différence entre le talent et l’intérêt, parce qu’il est possible de travailler les compétences si un intérêt existe à la base. Mais on ne peut pas pousser un enfant à avoir un intérêt qu’il n’a pas.

Vous décrivez TotUP comme un «univers conçu pour les enfants et les familles». Qu’est-ce qui différencie TotUP des modes d’éducation traditionnels?

L’idée d’un univers spécialement conçu pour les enfants et les familles vient du fait que nous adaptons l’apprentissage que nous prodiguons pour qu’il convienne à l’intérêt de chaque enfant. Notre méthode d’observation repose sur l’existence de 8 intelligences, chacune évaluée par le biais d’activités dispensées dans le cadre de notre programme. Nous nous appuyons sur des observations pures, ce qui permet à l’enfant d’explorer des approches éducatives variées.

Picture of TotUp childcare

Par exemple, si un enfant s’intéresse de manière systématique à la musique et montre un don pour les activités liées au son, qu’il s’agisse de musique pure, de yoga, de danse ou d’art, nous demanderons à un professionnel de la musique de poursuivre l’observation de l’enfant concerné.

Pour assurer l’objectivité de nos observations, nous sommes une équipe de trois à cinq membres qui analysons ces observations. Si un penchant naturel pour l’intelligence musicale émerge chez un enfant, nous suggérons à ses parents de lui faire pratiquer des activités parascolaires liées à la musique et nous encourageons l’école future de l’enfant à incorporer de la musique lors des transitions difficiles qu’il pourrait rencontrer. Des intelligences distinctes peuvent faire surface dans des activités apparemment sans rapport.

Cette observation globale nécessite un minimum de dix mois passés dans notre structure (l’enfant ayant entre 18 mois et 5 ans) avec au moins trois jours par semaine de présence; ce dispositif garantit une exposition adéquate. Nous fournissons aux parents un rapport détaillé sur les huit types d’intelligence, des recommandations pour les activités parascolaires adaptées et des conseils destinés aux enseignants.

Notre programme met également l’accent sur la durabilité et la consommation responsable. Les expositions d’art durable que nous organisons, par exemple, offrent aux enfants une expérience pratique du recyclage et de la débrouillardise. Très concrètement, pour l’enfant, ce sont les premiers pas vers la compréhension du fait qu’il est essentiel de prendre soin de la planète.

En fin de compte, nous visons à former des êtres équilibrés et responsables, capables à la fois de réussir sur le plan académique et soucieux des questions sociales et environnementales.

Pensez-vous que les questions d’argent et de richesse doivent être abordées précocement par le système éducatif?

Oui, tout à fait. Au niveau préscolaire, il peut être complexe de parler de l’argent avec les enfants. Mais dans les années suivantes, nous proposons un programme fait d’ateliers apportant des connaissances sur des questions pratiques telles que les services bancaires, les dépenses et d’autres sujets encore.

Il y a beaucoup à apprendre sur l’argent et les services bancaires, ainsi que sur les compétences de vie qui y sont associées. Je pense par exemple au fait de lire attentivement les contrats, de comprendre les conditions posées et de prendre des décisions éclairées. De nombreuses personnes manquent de connaissances sur des questions pratiques relatives à l’argent; je pense aux déductions opérées sur leur salaire ou aux clauses qui sont écrites en tout petit en bas des contrats qu’ils signent. Cela entraîne des problèmes que l’on pourrait éviter. Nous voulons créer une classe qui réponde à ces lacunes.

Quels défis avez-vous relevés tout au long de votre parcours entrepreneurial?

Eh bien, il est assez compliqué de lancer une entreprise en Suisse. Mais la bonne nouvelle c’est qu’une fois votre entreprise établie, vous y bénéficiez de plus de stabilité que dans d’autres pays.

TopUp childcare from Kristina Babina

Lorsque vous prouvez votre compétence à l’administration et aux personnes qui influencent le marché, ce sont le bouche-à-oreille et la réputation qui deviennent cruciaux pour la longévité de l’entreprise. Mais il est vrai que la phase initiale est difficile. Je me suis lancée à l’âge de 27 ans. Ça n’a pas été facile, car il y avait encore des préjugés contre les femmes entrepreneures.

En fin de compte, nous visons à former des êtres équilibrés et responsables, capables à la fois de réussir sur le plan académique et soucieux des questions sociales et environnementales.

Kristina Babina

Il faut dire aussi que le marché suisse est divisé en cantons, ce qui rend complexe le développement d’une entreprise dans différents cantons. Chaque canton a en effet des réglementations, des lois et des procédures administratives différentes. C’est comme entrer dans un nouveau pays à chaque fois.

En outre, le coût élevé de la main-d’œuvre en Suisse oblige les entreprises à se diversifier ou à créer de multiples structures pour réduire les coûts et réaliser des économies d’échelle.

Comment le système pourrait-il être amélioré pour aider davantage les entrepreneurs?

En Suisse, beaucoup d’investissements vont vers les secteurs qui bénéficient déjà d’un soutien. Je pense aux startups actives dans le domaine des hautes technologies et des produits pharmaceutiques. Nous devons les soutenir, mais nous ne devrions pas oublier les petites et moyennes entreprises qui contribuent à améliorer la qualité de la société. Dans notre cas, davantage de garderies pourraient directement permettre à plus de femmes de rejoindre le marché du travail.

Quand j’ai lancé TotUP, on avait coutume d’entendre que les garderies du secteur privé n’étaient pas nécessaires. A l’époque, il y avait environ 3500 enfants sur liste d’attente pour une place en garderie, et maintenant, six ans plus tard, c’est toujours la même chose. Entre-temps, nous avons ouvert deux garderies, qui ont profité à plus de 700 familles à Genève.

Le secteur privé est capable de plus de créativité, de flexibilité et de rapidité. Au lieu de s’opposer, secteur public et secteur privé devraient collaborer pour atteindre des objectifs communs, en utilisant leurs forces et résoudre les problèmes aujourd’hui et non dans un futur lointain.

Ceci mis à part, je dirais que l’accès à l’argent par le biais des banques, des investisseurs privés et du gouvernement devrait être plus facile pour les indépendants et les petites entreprises. La législation et l’administration doivent gagner en souplesse et, pourquoi pas, autoriser la mise en place de périodes d’essai ou le soutien à des idées novatrices.

Quelle est la prochaine étape pour vous et TotUP?

Malgré l’évolution de la réglementation, je souhaite poursuivre mon travail dans le canton de Genève. Nous explorons de nouvelles pistes dans le canton de Vaud et le canton de Neuchâtel.

Cette année, notre projet le plus important consiste à finaliser notre approche pédagogique et notre offre en matière de franchise. Nous sommes prêts à ouvrir des garderies et à apporter notre soutien à d’autres candidats à cette activité.

Nous nous orientons vers des garderies plus grandes ou plus petites, implantées dans diverses communautés. L’objectif à trois ans est d’être globalement plus présent, pas seulement dans les grandes villes, mais aussi sur d’autres marchés.

Quels conseils donneriez-vous à un enfant qui veut devenir un entrepreneur?

Je lui dirais de poursuivre ses rêves avec passion, même s’ils lui semblent atypiques. La foi et le travail acharné mènent souvent au succès, même si l’on rencontre aussi des échecs.

Je lui dirais aussi de ne pas se comparer aux autres. Sur les réseaux sociaux, on verra toujours des gens qui proposent des solutions de facilité et soutiennent qu’il n’est pas nécessaire d’étudier, de travailler ou de faire quoi que ce soit. Ces affirmations sont complètement fausses. Toutes les personnes que je connais qui réussissent travaillent dur, constamment.

J’aimerais demander à tous les entrepreneurs de témoigner avec documents à l’appui pour qu’ils partagent le récit de leur vraie vie professionnelle sur les réseaux sociaux. Les jeunes générations pourraient ainsi voir ce que le succès demande d’efforts.

Que signifie pour vous la richesse?

Ce n’est pas moi qui vais vous dire que l’argent n’a pas d’importance. Je pense que tout le monde a droit à l’argent et à la sécurité financière. Mais la vraie richesse va au-delà de l’argent. Il s’agit d’apporter un changement dans la vie des autres et de la société en général.

Au niveau préscolaire, il peut être complexe de parler de l’argent avec les enfants. Mais dans les années suivantes, nous proposons un programme fait d’ateliers apportant des connaissances sur des questions pratiques telles que les services bancaires, les dépenses et d’autres sujets encore.

Kristina Babina

Je vois l’impact de mon travail sur les enfants, les parents et les communautés; c’est là que réside la vraie valeur. Encourager les autres à s’engager dans un travail qui fait sens et à contribuer ainsi positivement au monde est essentiel à la richesse.

Merci, Kristina!

Si vous êtes prêt à être inspiré par quelqu’un qui, à l’instar de Kristina Babina, a audacieusement poursuivi ses rêves, nous vous recommandons la lecture de « Niels Rodin: De directeur de banque à la vie des agrumes. »

À propos de l'auteur

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