La Masterclass
Rui de Freitas

Les projets réussis reposent sur plusieurs piliers. Il faut un leader qui tienne bon, une équipe créative et une grande confiance en ses propres forces. Rui de Freitas a mené la start-up C Wire sur la voie du succès grâce à son flair et à sa persévérance. Le fondateur de l’entreprise nous explique comment il est parvenu à se hisser au sommet. 

Quelle forme de publicité préférez-vous ? 

Rui de Freitas : Les publicités dont on sait qu’elles apportent une valeur ajoutée et qu’elles ont un sens pour les consommateurs. Donc, au sens large, tout ce qui aide les consommateurs à trouver ce dont ils ont besoin, ou tout ce qui les inspire ou même les divertit.  

Quelle publicité aimiez-vous quand vous étiez enfant ? Qu’est-ce qui vous est resté en mémoire ? 

Les publicités inspirantes. Par exemple, ce que fait Nike. Des publicités qui font essentiellement la promotion de grands athlètes. Je trouve cela très inspirant et c’est pourquoi j’ai toujours aimé ce genre de publicité. 

Comment a commencé votre parcours d’entrepreneur ? 

J’ai certainement été influencé par la manière dont mes parents m’ont élevé. Une décision importante a été d’étudier l’informatique. Je pense qu’en tant que développeur, l’approche logique de la résolution de problèmes permet d’acquérir des compétences qui peuvent être utilisées dans tous les domaines de la vie. Par exemple, pour la création d’une start-up. Vous avez un problème que vous essayez de résoudre. J’ai réalisé que c’était ce que j’aimais. Et j’ai alors étudié la gestion d’entreprise pour comprendre davantage. 

Que s’est-il passé après ce processus de prise de conscience ? 

J’ai rejoint plusieurs start-ups, puis j’ai travaillé dans des entreprises où j’avais des responsabilités. Après avoir fait cela pendant un certain temps, j’ai senti que je pouvais avoir plus d’impact. Je voulais créer ma propre entreprise. Pour cela, j’ai regardé ce que les autres avaient fait, les grandes choses qu’ils avaient créées, mais aussi les erreurs qu’ils avaient commises. Tout cela m’a aidé à être suffisamment confiant pour me lancer. 

Approfondissons ce sujet. Quelles sont les compétences clés que vous avez développées ? Quelles sont les compétences nécessaires à un entrepreneur qui réussit ? 

De toute évidence, c’est un mélange de faire, d’apprendre et de chercher des solutions parfaites. Les entrepreneurs doivent également être résilients. C’est pourquoi la résilience est sans aucun doute la qualité principale à mon sens. 

Dans ce voyage, vous avez atteint le sommet. Probablement aussi parce que vous avez accumulé beaucoup de connaissances et en avez tiré les bonnes conclusions ?   

Pendant un certain temps, j’ai travaillé dans des entreprises de médias. J’ai alors compris qu’il fallait des solutions globales. Cela implique des approches multi-marchés. Cela m’a amené à créer une entreprise de technologie publicitaire. Ce qui me motive, c’est quand je crois fermement en l’idée et en son succès.  

Le journalisme est toujours le seul moyen de donner accès à l’information au plus grand nombre. Pour que le journalisme puisse remplir cette mission, il faut en faire une activité très rentable. Et c’est essentiellement ce que j’essaie d’obtenir par le biais de la publicité, c’est-à-dire de la « publicité qui réfléchit ».  

Quelle est l’importance du journalisme pour notre société ? 

Le journalisme est important pour nos démocraties, aujourd’hui plus que jamais. Il y a définitivement un besoin de contrôle, d’un « contre-pouvoir » qui demande des comptes au gouvernement. Mais les entreprises de médias ont également besoin d’un refinancement. La publicité est, selon moi, le meilleur moyen d’y parvenir. Le journalisme est toujours le seul moyen de donner accès à l’information au plus grand nombre. Pour que le journalisme puisse remplir cette mission, il faut en faire une activité très rentable. Et c’est essentiellement ce que j’essaie d’obtenir par le biais de la publicité, c’est-à-dire de la « publicité qui réfléchit ».  

Comment cela fonctionne-t-il en détail ? 

J’appelle cela raconter la vérité sous une autre forme, mais de manière rentable. Il s’agit de rapporter des faits, de dénoncer la corruption, mais aussi de divertir, car le journalisme ne doit pas se limiter aux informations. Il peut aussi raconter la vie d’une personne. L’important est que cela ait une valeur utile pour les gens et qu’ils puissent en faire quelque chose. L’aide concrète à la vie en fait également partie. L’offre est large et doit profiter au plus grand nombre possible de personnes. La base est le libre accès. Je veux donc m’assurer que la publicité est une source de revenus suffisamment stable pour que les gens n’aient pas à payer pour l’information. 

Vous jetez ainsi un pont entre deux mondes – le journalisme et la publicité. N’est-ce pas là l’idée fondatrice de C Wire et la description de votre mission ? 

Oui, j’ai beaucoup travaillé avec des éditeurs et des sociétés de médias et j’ai vu toutes les belles choses qu’ils faisaient. Mais j’ai aussi réalisé à quel point c’était difficile maintenant. Vos principales sources de revenus étaient les abonnements et la publicité. Les deux sont définitivement en baisse. Les tirages baissent rapidement. L’évolution numérique fait que vous devez générer suffisamment de revenus en ligne pour pouvoir vous permettre d’avoir une grande équipe de journalistes. C’est une situation difficile et j’aimerais qu’il y ait des solutions simples. 

Chez i-vest et Alpian, nous essayons de comprendre comment les entrepreneurs à succès comme vous définissent la prospérité. Qu’est-ce qui vous motive ? Qu’est-ce qui a une valeur durable ? 

La richesse a plusieurs aspects. J’ai rencontré des personnes dont la vie était riche, mais qui n’avaient pas d’argent. Et j’ai vu des gens très malheureux qui avaient beaucoup d’argent. Pour moi, la richesse est synonyme de bonheur. Avoir beaucoup de quelque chose que l’on désire. Les personnes aisées ont beaucoup de ce qui les rend heureuses. 

Concrètement, qu’est-ce qui vous rend heureux ? 

Trois choses : passer du temps avec mes proches, voyager et, bien sûr, travailler. Résoudre des problèmes, rendre les clients heureux. Cela me comble énormément. Faire des choses.  

Votre équipe joue-t-elle un rôle crucial là-dedans ? 

Oui. Vous devez trouver les personnes en qui vous pouvez avoir confiance. Les relations avec elles sont importantes. Montrez vos points faibles pour qu’ils se complètent et qu’ils puissent faire plus et mieux ensemble. La confiance est la base pour construire une équipe qui fonctionne simplement.  

Comment trouver de telles personnes ? Quels sont les critères de qualité décisifs ? 

Pour cela, il faut d’abord savoir ce que l’on fait bien et ce que l’on fait moins bien. Il faut trouver des personnes qui sont meilleures que soi. Même les choses que vous faites bien doivent être confiées à quelqu’un de meilleur. L’idée de base est la suivante : Une entreprise est toujours plus grande que l’entrepreneur.   

Cela demande beaucoup de confiance, n’est-ce pas ? 

Au début, il est plus facile de le faire avec des personnes avec lesquelles vous avez déjà travaillé. Cela réduit la probabilité de commettre une erreur, car vous avez beaucoup plus d’informations que si vous faisiez appel à quelqu’un de nouveau. Je commence donc toujours par des personnes que je connais, qui m’ont été recommandées, et j’essaie de mieux connaître les gens. 

Au cours de votre carrière, vous avez travaillé dans différentes maisons d’édition et organisations avant de créer votre propre entreprise. Quels sont pour vous les avantages de créer votre propre start-up par rapport à un emploi dans une entreprise ? 

Avant tout, la rapidité. Dans une grande organisation, il faut entraîner de nombreuses personnes. Cela prend évidemment plus de temps. Cela peut être très fatigant si vous cherchez à obtenir des résultats rapides. En fait, on peut faire les choses beaucoup plus rapidement dans une start-up. C’est un processus d’apprentissage global sur la manière de faire évoluer son organisation sans la ralentir. Il s’agit de se demander quels processus peuvent être mis en place pour améliorer l’efficacité et rendre les opérations évolutives. 

Une tâche difficile pour de nombreux jeunes entrepreneurs est de trouver des fonds pour se développer. Quelle est votre expérience en la matière ? 

Cela ressemble à des hauts et des bas. L’année dernière était certainement meilleure que celle-ci pour la levée de fonds. La macroéconomie s’est détériorée et les levées de fonds sont faibles. Si vous regardez combien d’argent a été levé en août, vous voyez que la tendance n’est pas votre amie. La question est de savoir s’il y a assez d’argent pour tout le monde. Il faut trouver les bons investisseurs. Vous ne voulez pas vous retrouver avec des investisseurs dont vous savez qu’ils vous ralentiront ou vous compliqueront la vie. C’est vraiment un art et c’est pourquoi il est très utile d’échanger avec d’autres fondateurs. Même avec d’anciens fondateurs, pour apprendre d’eux avant de faire ses propres erreurs. 

Comment recherchez-vous des investisseurs appropriés, quels sont les critères déterminants ? 

Il n’y a rien de mal à ce qu’un investisseur vous donne simplement de l’argent. La seule question est de savoir à quel point il est actif et si cela peut avoir un impact positif ou négatif. Ce que nous recherchons chez C Wire, ce sont essentiellement des investisseurs qui peuvent apporter une aide stratégique. Les plus difficiles sont ceux qui investissent et vous distraient lorsque vous essayez de vous concentrer réellement. 

L’argent est synonyme de liberté et vous donne l’espace nécessaire pour atteindre une prospérité perçue. Même si l’argent n’est pas synonyme de richesse pour tout le monde, il crée des espaces de liberté.

Que faut-il pour qu’un investisseur croie en l’entreprise ? 

Au début, les gens croient plus en vous et en l’équipe fondatrice qu’en l’entreprise. Ils se disent : « Ok, si ces personnes s’associent, elles peuvent faire quelque chose de cool ». Cela rend la confiance vraiment difficile à établir. Si vous trouvez quelqu’un qui partage la même vision et qui veut faire partie de la même mission, c’est déjà un très bon début. Ensuite, il faut convaincre que vous êtes la bonne personne pour cela. 

Ce n’est pas une tâche facile, n’est-ce pas ? 

Cela dépend aussi des phases de l’entreprise. Dans la phase initiale, le risque est moindre car les montants sont plus faibles. Mais dès que les coûts augmentent et que le « burning rate » potentiel est élevé, les problèmes commencent. Les investisseurs regardent le risque. Plus le « taux de combustion » est élevé, plus le risque est important. C’est aussi simple que cela. 

Revenons à la question de la prospérité. Quelle est l’importance de l’argent pour une vie heureuse ? 

L’argent est synonyme de liberté et vous donne l’espace nécessaire pour atteindre une prospérité perçue. Même si l’argent n’est pas synonyme de richesse pour tout le monde, il crée des espaces de liberté. Si je n’avais pas assez d’argent, je n’aurais pas pu me permettre de prendre le risque de créer une start-up. Plus on vieillit, plus on a besoin de sécurité financière. On a peut-être plus d’obligations, on veut réduire les charges de la vie. Le fait est que plus on en a, plus on est libre de faire ce que l’on veut. C’est ma définition de la liberté. 

Quel conseil donneriez-vous aux jeunes créateurs de start-ups ? 

Parlez avec d’autres fondateurs. Partagez la douleur. Obtenez un soutien émotionnel, car vous en avez besoin pour construire quelque chose de grand. Vous devez être conscient que les choses peuvent mal tourner. À un moment donné, vous devez prendre un risque. Vous devez entendre que d’autres personnes sont passées par l’enfer, mais ont quand même réussi. Cela vous aide à rester motivé et à développer la résilience nécessaire. En tant que patron, vous avez une grande responsabilité, tant pour les employés que pour les clients. Cela va donc être difficile. Un combat et une lutte. Mais c’est aussi très amusant et cela vous remplit de satisfaction lorsque vous réussissez. En tant que fondateur, vous construisez quelque chose dont les autres utilisateurs seront ravis. Réjouissez-vous de chaque succès et célébrez-le avec les utilisateurs qui vous entourent. Il y a quelque chose de vraiment gratifiant à créer une start-up et à créer des utilisateurs autour de vous qui adoptent votre vision. 
 

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